«La fellation c’est que pour les salopes» «Sucer c’est pas agréable mais si tu le fais pas, ton mec te quittera» «la fellation est un passage obligatoire» «on ne risque rien à sucer sans capote» «En pipe, soit t’es nulle soit t’es une déesse» «Si t’avales pas, tu vaux pas le coup» «les filles ne prennent pas de plaisir à la fellation»

D’où vient cette série de clichés? Des films pornos ? Des discours de la pensée dominante qui se veut bien pensante? Des films pour ados ? De la bouche de nos aîné(e)s? D’où qu’ils soient, ces clichés sont dangereux et peuvent être à l’origine de mal-être ou de blocage vis-à-vis de cette pratique. Il est donc important de s’atteler à les détruire.

Le B.A-BA du sexe, la règle d’or à ne jamais oublier et à marquer au fer rouge sur vos fesses est la suivante «Tout acte sexuel doit être fait dans le consentement et avec l’envie des différents partenaires. Quelque soit cet acte il ne sera considéré ni comme dégradant ni comme sale ou malsain».

Reprenons depuis le début : la fellation, tout comme n’importe quel acte sexuel, n’est pas un passage obligé. On peut y voir un préliminaire, un acte sexuel en soi, une façon de s’amuser et de dire «coucou, toi, tu sais que je t’aime bien» ou un moyen de tuer le temps, c’est à vous de voir.

La fellation n’est pas non plus, en aucun cas, jamais (dois-je encore insister?) un moyen de pression ou de chantage. Trop nombreux(ses) sont ceux se sentant obligés de pratiquer cet acte pour ne pas se faire quitter ou pour «être dans les normes», pour «faire comme tout le monde». A partir du moment où le chantage est présent, le plaisir disparaît. Et lorsque le plaisir est remplacé par de la peur, le sexe n’est plus ce qu’il devrait être et se transforme en source de souffrance.

Sachez que l’art de la fellation n’est pas un don inné. On a entendu beaucoup de filles se plaindre de ne pouvoir arriver à faire jouir leur amant de cette façon. Deux problèmes sont à pointer du doigt ici.

Premièrement, la fellation c’est comme le vélo : ça s’apprend (et ça ne s’oublie pas). Au début, on galère, on ne sait pas quoi faire de ses mains, de ses dents (un conseil : ne les sortez pas), de ses cheveux. Mais petit à petit, des techniques apparaissent et on se sent plus à l’aise, plus détendu(e), plus entreprenant(e). Le plus important est bien évidemment de communiquer avec son partenaire. Si celui-ci reste stoïque et ne donne aucune indication ou conseil, il est fort probable que vous vous sentiez tel le lama essayant de se vernir les ongles. La communication est donc la clé en matière de sexualité. De plus, chaque homme et chaque péni’ sont uniques : il faut donc les apprivoiser et apprendre par l’expérience ce qui les fait frissonner, ce qui leur plaît et ce qui va les faire débander à la seconde près.

Deuxièmement, l’orgasme n’est pas le but absolu, le saint graal. Le principal est que les deux partenaires y trouvent leur plaisir. L’orgasme, comme j’aime le dire, n’est que la cerise sur le gâteau. Il est tout fait possible et même plutôt courant, de ne pas jouir à chaque rapport et cela ne veut pas dire que vous êtes «mal foutues» ou que c’était une prestation plutôt médiocre. Vous y avez pris du plaisir? C’est que c’était réussi. Félicitations !

La fellation & moi, ça a fait deux.

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Cette pression autour des relations sexuelles, de la performance, de la perfection et de l’orgasme peut, malheureusement, mener à des blocages. Je suis moi-même passée par une phase de blocage vis-à-vis de la fellation. Il est temps pour moi d’en parler et de faire savoir au monde que c’est moins grave qu’on ne le pense et que la tendance peut être inversée.

Dans ma vie sexuelle, j’ai connu 5 péni’. Ayant été en couple monogame j’ai côtoyé le même péni’ pendant de longues années. Je le connaissais en long, en large et en travers, j’aurais pu le reconnaître les yeux bandés. J’avais commencé ma vie sexuelle avec ce garçon, je n’avais donc connu que lui, n’avait sucé que lui.

Le problème étant que ce garçon en question a développé un petit problème de santé : à chaque fois qu’il éjaculait, il saignait. Etant un peu phobique à la vue du sang, j’ai commencé à ressentir une petite angoisse quant à l’idée qu’il puisse jouir pendant une fellation et que je me retrouve avec du sang dans la bouche. J’étais donc prise entre deux feux : d’un côté j’aimais beaucoup me servir de son péni’ comme d’une sucette, d’un autre cette même sucette était une bombe à retardement. Cela m’a menée à intégrer l’idée que fellation = angoisse = plus jamais. Cependant, je continuais, pour lui faire plaisir. Ce qui, je le rappelle n’est ni une bonne motivation ni une attitude «normale» et attendue.

Lorsque ça s’est terminé avec ce garçon et que je suis passée à un autre amant, je n’ai pas pu m’approcher de la zone à traiter, jamais. Mais cet homme-là était correct et ne m’a jamais forcée ou fait de réflexion à ce sujet. Le problème est que psychologiquement j’étais dans une impasse : j’avais le souvenir d’aimer la fellation, je voulais retrouver ces sensations, j’avais un nouvel amant mais je n’osais pas me jeter à l’eau. J’ai donc renforcé mon blocage à base de «si je ne le fais pas, il va me quitter» et de «de toute façon, je suis sûrement nulle». Parce que oui, avec l’absence d’entraînement et un nouvel amant est venue la certitude que mes talents de suçotage étaient assez médiocres.

J’ai passé deux autres amants à ne pas oser, à me torturer, à me lancer des challenges. En vain. Et puis, j’ai rencontré le dernier mâle en date. Appellons-le Marcellin. Marcellin, voyez-vous est le genre de garçon pour qui ma culotte tombe de son plein grès. C’était donc évident que dès la première nuit nous nous retrouvions en tenue d’Adam au beau milieu de mon salon.

Et de là a commencé une relation sexuelle on ne peut plus satisfaisante. Je ne sais pas par quel hasard, par quel miracle mais Marcellin a réussi à me redonner confiance en moi. En mon corps, que je trouvais moyen et qu’il me fallait toujours camoufler du regard des autres et en mes capacités sexuelles. A la même époque les liens avec les filles de «Banane et Abricot» se tissaient de plus en plus et je commençais à m’ouvrir à de nouvelles pratiques et à réaliser qu’il n’y avait pas qu’une sorte de sexe, mais autant de sortes qu’il y a d’individus. Ce qui m’a rassurée. Un poids était enlevé : je n’étais pas obligée de faire comme les autres, je pouvais suivre mes envies et aucun de mes fantasmes n’était classé malsain ou inapproprié. Et mieux : je pouvais en parler librement. C’est à elles que j’ai d’abord parlé de mon blocage. Et suite à d’autres nombreux témoignages, j’ai vu que je n’étais pas seule, que c’était monnaie courante et que c’était bel et bien la faute des clichés se trouvant à chaque coin de rue et page de magazine.
Pendant plusieurs mois, il va sans dire que je n’ai pas tenté de fellationer Marcellin, qui lui de son côté ne s’est jamais plaint, ne m’a jamais forcée (sinon, il aurait pris la porte avec une couille en moins) et a patienté calmement. Jusqu’au jour où il a osé me le demander. Cette demande m’a trottée en tête pendant plusieurs jours, j’avais peur qu’il me trouve totalement gauche, de ne pas lui faire plaisir, qu’il débande même. Et puis, un jour je me suis lancée, comme ça, sans réfléchir.

Et j’ai aimé. C’était doux, ça sentait bon, c’était agréable. Et je me suis souvenue de sensations qui me plaisaient. Cependant, Marcellin n’étant pas mon premier partenaire, plusieurs choses ne lui convenaient pas et il me l’a fait savoir. Passé ma (grande) vexation, je me suis mise aux travaux pratiques. Et à ce jour, sachez que je progresse et que Marcellin a l’air plutôt content.

La grande différence avec mon premier amant est que je ne pratique plus la fellation avec des idées de performance ou de buts précis en tête. Maintenant, je le fais parce que ça me plaît, parce que j’aime les bruits que Marcellin fait dans ces moments là et que je prends du plaisir à le sentir et à le voir en prendre.

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Avec l’habitude et le plaisir, la fellation devient une sorte de terrain de jeu, de découvertes. On se met à faire des choses dont on n’aurait jamais cru notre langue capable, on découvre des points sensibles, on s’amuse à essayer d’en trouver d’autres. Parfois même on tente d’intégrer certains liquides ou mets comestibles à la partie.

Traverser un blocage n’est jamais simple. Il faut essayer d’effacer tous ses à priori et ses doutes. Il faut accepter d’être vulnérable, de ne pas atteindre la perfection dés la première fois. Et de se laisser guider. Il est facile de dire de ne pas hésiter à se lancer à l’eau, mais beaucoup plus dur de passer à l’acte.

En conclusion, n’oubliez pas que tout ceci est une question d’entraînement et de prise de plaisir. Si on se met à trop intellectualiser le moment, à se demander si on fait bien, ce qu’il faut faire après et bordel, que dois-je faire de mes mains, on risque d’être déconnectée du moment et à ne pas l’apprécier.

Mais n’oubliez pas que non plus que la pratique de la fellation n’est pas safe, qu’il vous faut enfiler un préservatif si vous n’avez pas totale confiance en votre partenaire. Règle qui semble trop souvent être prise à la légère. Pour plus d’infos,  faites un tour dans la partie «protection & contraception».

Pourquoi on aime ?

Pour terminer cet article, je me suis penchée sur le cliché le plus répandu en matière de fellation «les filles n’aiment pas ça». Afin de vous convaincre de la fausseté de cette affirmation, j’ai fait le tour de me copines et je leur ai simplement demandé pourquoi elles aussi, elles aiment ça. Voici leurs réponses.

« Les zizis c’est gourmands et c’est bon »
« Parce que j’adore au plus haut point les sentir se durcir dans ma bouche. Que c’est tout doux. Que je kiffe savoir que je peux faire ça avec ma bouche»
«Parce qu’il aime bien me regarder le sucer. Et que ça m’excite.»
«Parce que c’est bon, c’est doux, c’est chaud, quand ça bande c’est que c’est content, c’est comme un bisou avec la langue mais plus long et plus intime, et ça suscite chez mon homme moult réactions excitantes»

Vous vous demandez peut-être pourquoi les propriétaires des péni’ aiment de leur côté, je leur ai aussi posé la question.

«J’aime savoir qu’elle a le contrôle, d’être en sa possession»
«Elle prend le total contrôle, il y a une forme d’abandon»
«Savoir qu’elle y prend du plaisir augmente encore plus le mien»

N’oublions pas de préciser qu’aimer et pratiquer la fellation n’est pas une obligation. Il n’y a pas de honte à dire à son partenaire que ce n’est pas notre truc ou qu’on ne le sent pas pour le moment. Les goûts en matière de sexualité ne sont pas universels ni soumis au jugement. De plus, tous les hommes ne sont pas amateurs de fellation. On en revient donc au principe de base : la communication.

 

Rrose Sélavy

3 réponses à La fellation : une obligation ?

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